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Pendant la guerre entre 1943 et 45 - Les sœurs du Pauvre Enfant Jésus au château David dit Château Eulenburg à Moresnet. (Syndicat d'initiative trois frontières)

Histoire ➔ Chroniques diverses ➔ Château David-Eulenburg

Chroniques diverses


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Château David-Eulenbg.

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Pendant la guerre entre 1943 et 45

Les sœurs du Pauvre Enfant Jésus au château David dit château Eulenburg à Moresnet.


C'est par hasard, avec un grand intérêt que j'ai pu rencontrer M G. Schreuer, habitant la petite demeure dans le parc côté est, au pied du castel. Il me fit visiter l'extérieur du château et me donna de nombreuses explications, dont l'histoire racontée par les soeurs mêmes.( Sources : archives de la communauté des soeurs)

Au mois d'août 1943, la Mère provinciale décida de transférer la maison mère de "la communauté des sœurs du pauvre enfant Jésus" (1) à Moresnet, où un domaine familial, la "Eulenburg" leur fut proposé. Le castel se trouvait sur une colline à un endroit idyllique, isolé au bord d'un petit bois, mais en mauvais état, inhabité depuis 20 ans, mais occupé par des chauves-souris, des araignées, des souris. Des têtes d'animaux les plus étranges garnissaient les escaliers et les chambres. Les meubles étaient attaqués par les vers, il fallait déjà beaucoup de courage pour remettre en bon état ce beau château, appelé "David".

Le 17 août 1943, les premières sœurs vinrent s'installer. Il en arriva bientôt d'avantage et la mise en état dura jusqu'au début de novembre. Les travaux des ouvriers ne prenaient pas fin, car l'électricité et sanitaires étaient très primitifs ; l'arrangement des conduites électriques et des conduites d'eau exigèrent de gros travaux et des dépenses élevées.

Le 5 novembre 1943 fut célébrée la première messe, à laquelle la Mère provinciale avait invité toutes les Mères de la province (allemande). On note aussi la présence de Mère Alexia. Le Révérend Curé Licht tint un beau sermon de circonstance.
Les jours suivants arrivèrent alors les anciennes sœurs de Gemmenich, qui furent accueillies dans le jardin d'hiver, au son de la cloche du château. Depuis le début décembre 1943, jusque août 1944, la Eulenburg était aussi un endroit de passage d'une dizaine d'enfants du home de Forges-Baelen. Le 2 février 1944, à l'occasion du jubilé d'or de notre communauté, Mgr van der Velde Evêque d'Aix-la-Chapelle fut de passage au château. Le jardin d'hiver fut choisi comme salle de fête. La photo de Sœur Clara fut mise en évidence et décorée ; au réfectoire on pouvait observer un grand transparent à la fenêtre, y était écrit : "Jésus est la joie des sœurs". Mgr célébra la cérémonie festive avec un sermon de circonstance. Le 4 février , la première sœur d'Eulenburg Sœur Marca, décéda. Elle décéda après de longues souffrances, elle fut inhumée au cimetière de Moresnet.

Dans la nuit du 11 au 12 avril 1944, Eulenburg vécut avec frayeur le premier bombardement d'Aix-la-Chapelle, qui fit trembler tout le castel. Plus grand fut encore le désarroi lors du grand bombardement de la gare de Montzen (le 28 avril 1944). Les sœurs étaient longtemps à genoux dans les caves du château et ne pensaient pas survivre la nuit.

La Eulenburg accueillit plusieurs sœurs en convalescence pendant l'été. La nature était si proche ; quelles belles promenades nous fîmes dans les bois, et combien de soirées chantantes nous organisâmes sous les branches pendantes des hêtres !

Le 7 septembre 1944 commençait pour nous habitants de Eulenburg un temps critique. Beaucoup d'Allemands étaient passés en auto, en train et en attelages à chevaux. Pendant plusieurs jours un groupe de SS cantonnaient avec leurs autos et canons dans notre parc, Ils partirent le jeudi 7 septembre 1944. Vers 6 heures du matin se trouvaient à Moresnet gare, les deux derniers trains en partance pour l'Allemagne. Les Américains ne se trouvaient plus qu'à une distance de 25 km.

Le même jour la Mère provinciale ordonna que les sœurs aînées, avec provisions et autres objets, soient transportées dans l'excavation rocheuse.
Séparément les sœurs âgées furent chargées sur une petite voiturette entourée de paquets et de couvertures et alors la charrette fut tractée par quatre plus jeunes sœurs, par un chemin créé par les soldats au travers des bois, vers le souterrain.

Les gens et leurs enfants chargés d'objets divers se rendirent au même refuge ; ils étaient au nombre de 1500. Le soir la chère Mère et les Sœurs se rendirent également dans le "Bunker" afin d'y dormir.

Là, depuis plusieurs semaines les familles des villages environnants, s'étaient fabriqué une habitation. Chacune dans un coin différent, avec des balles de paille et planches ou des murs en couvertures et même des portes avec fermeture. Ainsi nous avons dans une grotte, prévu une salle communautaire séparée par des balles de paille. 16 lits d'abris, souvent l'un au-dessus de l'autre, y avaient trouvé une place. Les autres 24 lits manquants furent remplacés par des lits de paille ou des relaxes. Au milieu de la petite grotte se trouvait un petit autel de campagne avec ciboire et où brûlait une petite lumière permanente qui de la sorte rompait par ses rayons, l'obscurité permanente.

Au-dessus de notre grotte il y avait une roche épaisse de 20 mètres, et par-dessus la forêt protectrice. Chaque occupant se trouvait ainsi protégé des chutes de bombes, on se rendit cependant compte et ceci après-coup, que par la chute des roches, l'abri n'était pas aussi sûre qu'on ne l'avait imaginé.

Toute l'image de la vie en "catacombe" était réellement picturale. Toutes les personnes apportèrent des lumières et se promenèrent dans la grande grotte. Dans tous les coins vivaient des gens. A l'extérieur, aux arbres pendait le linge d'enfants et sur les pierres les réfugiés faisaient leur cuisine. Tous étaient cependant tranquilles et décidés.

Le dimanche 9 septembre, le Révérend Curé Licht, reçut la permission d'exercer le sacrement de confession et de célébrer la messe les dimanches suivants. Le besoin et le danger, dans lesquels nous nous trouvions conduisirent beaucoup de gens vers le sacrement du pardon. Entre-temps, les hommes construisirent dans la partie supérieure de la grotte, un autel décoré de fleurs et de verdure. Les derniers préparatifs à la célébration du St Sacrifice furent exécutés par nos sœurs, le lendemain matin.

Le 11 septembre 1944, pendant la contemplation, ce fut l'explosion du viaduc de Hergenraedt. De nombreux chars se dirigeaient vers Montzen. Pendant toute la matinée les troupes Allemandes furent mitraillées par l'aviation américaine. Le soir le pont de la Gueule fut détruit. Pour cette cause les canalisations d'eau furent détruites et nous restions de longues semaines sans eau.

Pendant la nuit il y eut beaucoup d'activité d'artillerie, si bien que c'est avec hésitation que nous quittions notre abri. Directement après la messe les avions éclaireurs volèrent au-dessus de nous, et nous menaçaient, si bien qu'après le déjeuner, nous nous réfugions vivement dans les caves. Les avions faisaient des cercles de plus en plus étroits, et bientôt les gens proclamèrent que les Américains avaient libéré Montzen au son de la cloche ! Les troupes s'approchaient par la chaussée de Liège.

Vers 3 heures apparurent les premiers officiers Américains au castel, afin de se rendre compte de qui l'habitait. Ils n'en voulaient pas d'avantage. Vers 5 heures forte détonation de l'explosion du pont de Buschhausen. Vers 6 heures salut dans l'abri ; toutes les sœurs s'y étaient réfugiées. Les gens accompagnaient les sœurs pour prier le chapelet. Pour la première fois nous exécutons la prière du soir dans l'abri.

La nuit suivante la menace de l'artillerie fut très forte ; c'était comme l'explosion d'énormes bombes explosives. Le matin suivant nous célébrons la messe dans notre partie de l'abri. Ce jour circulaient beaucoup d'autos et de chars dans le village de Moresnet. Beaucoup d'autos et de canons se plaçaient sous les arbres dans notre parc. Beaucoup d'avions allemands de basse altitude tiraient à partir de leur appareil avec les armes de bord. De cela il fallait toujours être attentif. Lorsque, à midi, nous portions vers l'abri pour dîner, le danger était vraiment réel. Le chemin durait de 5 à 8 minutes ; mais souvent il arrivait brusquement que les avions allemands tiraient des rafales dans le bois. Plus d'une fois, avec sceaux et cruches, nous nous sommes cramponnés aux arbres du bois pour nous protéger !

Plusieurs de nos sœurs avaient adopté les enfants de l'abri, pendant des heures ils jouaient avec eux, ou leur racontaient des conte de fée et leur donnaient des cours de religion. Les parents en furent très reconnaissants. Les gens montrèrent une grande reconnaissance et confiance aux sœurs, ils apportaient beaucoup de soucis matériels et spirituels. Partout nous pouvions aider.

Entre-temps nous étions situées entre deux fronts. Autour de notre castel s'était fixée la lourde artillerie américaine, qui dirigeait son tir continu sur la ville d'Aix. Après chaque tir tout le château tremblait, toutes les vitres tremblaient, les meubles bougeaient, ce fut effrayant. Le plus dur pour nous était de savoir que tous les obus étaient destinés à notre chère patrie.

L'un des jours suivants, à l'une des heures tranquilles, plusieurs sœurs se rendirent à l'abri, pour rendre visite aux plus vielles sœurs et leur annoncer, d'après les conseils des officiers américains qu'il était préférable de rester abritées après avoir respiré l'air pur à la surface du refuge souterrain. Pendant huit jours déjà, elles étaient enfermées sous la terre, et ce fut une grande joie pour elle de pouvoir revoir la lumière et respirer l'air pur pendant une demi- heure avant de rejoindre leur funeste habitation.

Le soir un feu d'artillerie terrible comme nous ne l'avions jamais entendu se produisit. Un roulement ininterrompu de tir pourfendait l'air. On entendait les colonnes d'air éclater l'une à côté de l'autre, la terre tremblait. Cela dura une heure. Alors la nuit resta passablement calme. De sorte que plusieurs sœurs se décidèrent à quitter la cave. Cependant la nuit suivante elles perçurent des notes de mort. A 12 heures, un sifflement terrifiant passa le long de la maison et se termina par une explosion bruyante. Par intervalles ces phénomènes se reproduisaient régulièrement. De la fenêtre les sœurs observaient ce puissant feu d'artillerie.

Le ciel était éclairé de lumière bleu-vert, c'était l'artillerie allemande qui visait notre château. Nous descendîmes dans nos caves et priions. Le Révérend Curé Licht nous donna l'absolution générale. Entre 2 et 3heure et jusque 5heures nous assistions à une trêve. Très proche de nous les obus tombaient, notre buanderie fut percée par des débris de bombes. Dieu nous a merveilleusement protégées.

Le dimanche matin, déjà très tôt, les gens en grande foule arrivèrent. Cela ressemblait à un monde chrétien des catacombes, hommes femmes, mère et leur enfant sur les bras tout ce monde se précipitait vers l'endroit eucharistique et s'approchait du banc de communion. Le chœur des religieuses et la communauté chantaient en alternance. Le révérend curé tint un sermon touchant, il comparait notre grotte à l'étable de Bethléem. Dans l'assemblée on entendait les pleurs et personne ne se moquait. Parmi ceux qui s'approchaient de la sainte table, nombreux étaient ceux qui ne fréquentaient plus l'église. Après la Sainte Messe beaucoup s'approchaient du confessionnal. Une femme disait que cela était le beau jour de sa vie.

La journée fut assez mouvementée. Toujours des avions à basse altitude !
Lorsque nous étions au dîner nous vîmes soudainement un avion en basse altitude passant au-dessus de l'imposant viaduc de 1100 mètres de long qui se trouvait juste devant notre château. Un nuage sombre s'élevait, et nous reconnûmes que la liaison entre les deux derniers piliers gisait brisés sur le sol. Ainsi fut détruit en un instant ce que l'esprit humain après un long et pénible travail.

Le jour suivant nous apprenions, combien ce 12 septembre 1944 était dangereux pour nous. Les Américains savaient que trois jours plus tôt les troupes SS campaient dans notre parc, et qu'ils pensaient toujours présents, ils avaient pointé leur canons sur nous.

Le 16 septembre 1944, par bonheur l'artillerie américaine nous quitta. Mais pendant la journée nous assistions encore à de puissants tirs d'artillerie. De gros bombardiers américains nous survolaient. Le soir pendant l'office la situation devint critique pour nous.

Six chasseurs allemands furent en combat aériens avec vingt bombardiers américains. Une grosse explosion eut lieu et l'un des chasseurs allemands fut touché et s'abattit en feu, dans une prairie proche. Les parachutistes furent arrêtés. De l'autre côté du pont un autre chasseur en feu disparut dans la profondeur. Entre-temps la lourde artillerie continuait son action.

La plupart des sœurs ainsi que les gens retournèrent dormir dans la grotte. Le lendemain matin nous continuions à entendre le roulement terrible du tonnerre des armes. Sans trêve un essaim d'avions tournoyait au-dessus de nous. Des nuages de fumées épais s'élevaient au-dessus d'Aix-la-Chapelle. Était-ce des explosions, des incendies, dégâts de bombes ? Sans cesse nous nous posions la question. Jusqu'au soir et puis cela recommençait.

Comme Aix se défendait tellement avec vigueur, la bataille s'intensifia. Et cela continua des jours. Nos vieilles sœurs devaient tenir le coup dans leur sinistre abri.

Dans la nuit du 19 au 20 septembre 1944, l'artillerie et de nombreux avions allemands nous menaçaient. A La Calamine tombèrent des bombes et les bruits de cannons s'entendaient dans le lointain. Nous souhaitions ne plus habiter sur le champ de bataille. Le 21 septembre 1944 nos vieilles soeurs purent quitter leur abri. Heureuses , elles furent conduites sur les charrettes vers leur domicile.

Au soir nous observâmes, au commencement de la nuit une colonne couleur sang monter au-dessus d'Aix, celle-ci s'estompa tard dans la nuit. A nouveau les soucis pour nos sœurs d'Aix se firent ressentir. Le 24 septembre, ce fut une journée de prière et de remerciements, dans la chapelle castrale, en reconnaissance de la protection pendant la semaine écoulée. Le soir nous distinguions à nouveau, au-dessus de la colline enneigée le magma brûlant dû au feu. A gauche sur la Hollande le même spectacle et plus tard dans la nuit au sud-est d'Aix. Le bruit infernal des nombreuses bombes qui tombaient sur Aix, nous laissèrent sans doute sous la puissance du feu. Combien avons-nous, prié, été soucieux pour nos cher ressortissants de notre patrie.
Quelques jour plus tard nous entendions le bruit des canons de l'autre côté de la frontière, canons que nous avons vus défiler en file au travers de Moresnet.

Quelques semaines plus tard nous avons vu les bombardiers américains s'approcher de Cologne, était-ce l'attaque de Cologne ? Nous n'étions plus en danger. Le 4 octobre 1944, la fête de St François d'Assise nous apporta une petite surprise. Tard dans l'après-midi, devant la grande porte d'entrée du château, un camion de transport américain nous amena 12 sœurs de Steinebrück près d'Aix. Les Américains les avaient sorties de leur cave pendant les combats d'artillerie. En un quart d'heure, elles devaient être prêtes au départ en laissant tout en plan, maison, jardin, bétail . Nous étions heureuses d' accueillir les sœurs en nous serrant un peu plus. C'était évidemment un signe d'amour, que les filles de Mère Schervir trouvaient accueil chez les filles de Mère Clara ?

Le combat devenait de plus en plus fort à Aix-laChapelle, la ville ne voulait pas se rendre ?

Après que les Allemands refusèrent l'ultimatum des Américains, le bombardement s'intensifia, jusqu'à la fin des combats le 20 octobre 1944 la perte en vies humaines fut importante aussi bien d'un côté comme de l'autre. Au château fut fêté en ce moment la fête de notre Mère provinciale dans une atmosphère familiale, tout en pensant à nos sœurs qui étaient dans la souffrance.

Le 16 octobre 1944, dans la petite maison en bas du château, avec la permission des autorités, nous ouvrions une petite école, pour les enfants du bord, les enfants de la rue, on y enseignait aussi bien en français qu'en anglais. Le nombre d'enfants augmenta tellement qu'il fallut agrandir bientôt cette école.

Pour nous Allemandes la situation devint insupportable, partout on fêtait la libération, on célébrait des offices religieux. Les églises étaient garnies que de drapeaux belges, nulle part on assistait à des manifestations de paix ou de réconciliation. La dite Armée Blanche apparaissait partout et voulait arrêter tous les Allemands et s'emparer tous leurs biens. Heureusement les Américains intervinrent. Des perquisitions dans les maisons des ressortissants allemands, et plusieurs fois au castel de Eulenburg. Une fois l'Armée Blanche tira plusieurs balles sur un pensionnaire, elles ne touchèrent heureusement pas la personne visée, Dieu soit loué.

Fin octobre 1944, nous quittèrent plusieurs sœurs franciscaines. Elles retournèrent dans leur patrie à Burtscheid, nos supérieures visaient à y retourner. Mère Clara Chantal se mit en route avec quelques sœurs. Elles virent partout désolation et destructions et que très peu de gens. A Burtscheid il n'y avait personne. La découverte d'une maison vide, une table servie laissèrent supposer que les sœurs du couvent avaient quitté la maison à la hâte. L'absence de connaissance de leur habitation actuelle nous laissa dans l'inquiétude.

Pour protéger le bien de Burtscheid, il était nécessaire d'y envoyer des sœurs car on volait beaucoup. Le 6 novembre se rendirent donc 4 sœurs de notre castel, afin de remettre notre maison mère en ordre. Mère provinciale et Mère Clara Chantal obtinrent un passeport, afin de pouvoir se rendre à Aix une fois par semaine.

Le 3 novembre 1944, nous ouvrions une école de couture pour jeunes filles en fin de scolarité. Elle fut bien fréquentée et plus tard nous ouvrions une école de confection. Un dimanche avant Noël, fut organisé une exposition d'habits.

De graves soucis se présentèrent à nouveau, lors de l'offensive des Ardennes, pendant le temps de Noël. Le front se rapprochait à nouveau de nous et nous pensions à nouveau d'être au milieu du champ de bataille. Dieu soit loué cela ne se produit pas.

Depuis la libération de la Belgique par les Américains il n'y eu plus de subvention et pendant une demi année il nous fallut tirer notre plan. De jour en jour, les sœurs par groupe de deux passaient de ferme en ferme avec une petite charrette, par chemins et prairies marécageux, quelques vivres de subsistance. Aussi la cuisine américaine nous aida bien et généreusement. Ils soignaient pour les " sister " du château et chaque jour deux sœurs partaient avec des sceaux pour chercher de la nourriture pour la communauté et pour le bétail.

Dans les premiers mois de 1945, la frayeur des bombes volantes nous envahit. Liège était leur objectif, nous étions sur leur trajet. A courte distance ces engins de feu passaient à côté du château. Tout le castel tremblait, les vitres vibraient. Au son de leur déplacement nous estimions combien de temps elles restaient en l'air et après combien de secondes, elles s'écrasaient au sol et explosaient. Peu importe où l'on se trouvait, pendant la messe, ou pendant le salut, ou pendant le repas ou pendant l'enseignement on se lançait sur le sol en attendant une éventuelle mort certaine.

Beaucoup de ces bombes volantes appelées aussi V1 et V2 se sont écrasées sur la ville de Liège.

Comme nous n'avions pas encore eu de soldats américains dans notre château, ceci arriva à la fin de février 1945 lorsque un groupe de vingt-sept soldats venant du front, fait la demande de pouvoir se reposer chez nous. Le réfectoire et quelques chambres furent mis à disposition. C'est ici qu'ils se reposaient sur des matelas.

A Pâques, fut ouverte l'école à Moresnet, de ce fait après une demi- année de plein succès notre école subit une grande concurrence au grand désaroi de la population limitrophe du château, car c'était pour un des moyens de subsistance. Maintenant nous nous sommes concentrées sur l'apprentissage des langues, et de la couture. Avec cette rentrée et les dons des bienfaiteurs nous nous sommes tirées d'affaire.
Entretemps Mère provinciale et Mère Clara Chantal étaient reparties pour Burtscheid et revenaient de temps à autre. C'était alors des journées de joie. La Mère provinciale était toujours préoccupée par nos besoins elle nous apportait toujours quelques vivres et parfois même un bon morceau de lard. Au mois d'avril, la Mère provinciale et trois sœurs firent une retraite tenue par le révérend curé. C'était vraiment des journées de grâces, parmi les premiers bourgeons et floraisons du printemps.

Au début juin se déroula à nouveau la procession à Moresnet, tout le monde se réjouit sur cet événement religieux. Nous pouvions au bas du castel ériger un autel pour la bénédiction du St Sacrement. Des sceaux, des vases avec des fleurs des prairies ou des jardins, des couronnes de fleurs de toutes sortes. Les franciscains mirent 80 drapeaux à notre disposition ainsi au château les fenêtres et les tourelles étaient garnies pour le passage de la procession. Le point central était évidemment l'autel du St Sacrement au- dessus duquel se trouvait une croix.

Bientôt notre vie couvent au château allait prendre fin.

En effet, jusqu'au 30 juin toute personne allemande arrivée en Belgique après 1940 doivent quitter le pays. Les personnes ne pouvaient emporter que cuisine et chambre à coucher, le reste passait sous séquestre.

Le couvent devait être transféré à Schleiden, maintenant il fallait transporter tout au-delà de la frontière. Tous les biens devaient être déclarés à Liège mais tout devait passer par Bruxelles, ce qui signifiait un long temps d'attente.
Le 3e mercredi après notre déclaration, nous recevions une réponse du séquestre que nous pouvions tout emporter, cela signifiait tout même les moutons et les poules...
Personne jusqu'à présent n'a joui d'une telle faveur, c'est pourquoi on nous demanda de tenir la chose secrète.
Il fallait organiser maintenant le transport, une firme de transport Eupennoise, exécuta ce déplacement avec un camion de 9 tonnes, au prix de 8000 frs, nous devions assurer 5 transports. Un dimanche un américain nous acheta pour le prix de 5000 Frs des travaux manuels, la Mère provinciale nous fit parvenir du matériel que nous revendions pour quelques milliers de Frs.

Une grande fête au château la Eulenburg, ponctua notre départ du château David le 5 août 1945.

(1) Il s'agit de la même congrégation de soeurs en provenance de Burtscheid (Aachen) et qui vécurent à Maria-Hilf (Moresnet-Buschhausen) et Gemmenich.

Traduction d'une partie de l'article écrit en langue allemande par Gerard Schreuer (faisant partie l'arbre généalogique des David)
Extraits: Chronique 14 par J.Langohr (Gemmenich)
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